«Offshoring» : des expériences non concluantes
Dans un billet que j’écrivais avant les fêtes en réaction à la création de la Foundation for Transparency in Offshoring, je posais la question suivante : «Est-ce que SOM fait dans l’offshoring?» La réponse est non. Nous avons par contre effectué dans le passé trois projets pilotes… qui se sont avérés non concluants. Je vous explique comment et pourquoi.
Pourquoi délocaliser une partie des activités de collecte?
En fait, la question n’est pas tant la délocalisation elle-même que la sous-traitance. Malgré une équipe variant entre 150 et 200 intervieweurs selon la période de l’année, la rareté de la main-d’œuvre, jumelée à une période de pointe, nous a quelquefois amenés à confier une partie des activités de collecte téléphonique à un tiers. Se pose alors LA grande question : qui sera l’heureux élu?
Les critères dans le choix d’un sous-traitant
Les standards de qualité élevés de SOM limitent grandement les possibilités de sous-traitance. Plusieurs critères entrent en ligne de compte pour choisir une firme, par exemple :
- le respect rigoureux des normes de conduite d’une entrevue téléphonique;
- la compétence des intervieweurs et des intervieweuses;
- les mécanismes de contrôle de qualité que la firme a mis en place (on exige notamment de pouvoir écouter les entrevues réalisées par le sous-traitant);
- la possibilité pour la firme de se brancher sur nos systèmes informatisés pour effectuer la collecte (on utilise ainsi nos propres outils de suivi).
Le type de projet à confier en sous-traitance
Chez SOM, seuls des projets qui ne contiennent aucune information nominative pourraient être confiés en sous-traitance. Le respect de la confidentialité et la protection des renseignements personnels étant de la plus haute importance, nous limitons ainsi les brèches possibles de sécurité. Donc, seuls des projets avec échantillons RDD (génération aléatoire de numéros de téléphone ou, en anglais, Random Digit Dialing) pourraient être sous-traités – mais l’échantillon serait bien sûr constitué ici.
Les projets pilotes à l’étranger
Contrairement à d’autres firmes – aux États-Unis par exemple – nos sous-traitants doivent parler français. Le choix est par conséquent limité. Nous avons donc fait appel à trois firmes situées au Maroc et en Tunisie. Dans tous les cas, il ne s’agissait pas de projets clients, mais bien de sondages de type omnibus menés en parallèle de notre omnibus régulier, le SOM-R, de façon à pouvoir comparer les résultats (les données obtenues n’ont été utilisées qu’à des fins de comparaison).
Au terme de l’expérience, voici les principaux éléments positifs et négatifs que l’on peut dégager :
Le positif
- Une grande motivation. Les firmes concernées étaient en effet très motivées à conquérir un nouveau marché : obtenir des mandats de collecte en Amérique du Nord, ça veut dire un nouveau quart de travail la nuit et la rentabilisation des équipements presque 24 heures sur 24. Aussi, les firmes étaient très intéressées à se conformer à nos standards de qualité.
- Des intervieweurs compétents. Là-bas, être intervieweur est un métier prisé; le taux de roulement est faible et les intervieweurs, qui ont souvent plusieurs années d’expérience, sont très compétents.
- Les coûts. Évidemment, la principale raison de faire affaire à l’étranger plutôt qu’ici, c’est de payer moins cher. La facture à payer était d’ailleurs légèrement inférieure à nos propres coûts de production.
Le négatif
- Des problèmes techniques. Le principal défi rencontré a été d’ordre technique. Par exemple, les difficultés liées à la connexion Internet faisaient en sorte que le chargement d’une page pouvait prendre entre 1 et 3 secondes. Imaginez un délai de 3 secondes entre chaque question! On a alors des entrevues beaucoup plus longues et des répondants exaspérés.
- Des différences culturelles (1). Si le questionnaire porte sur des événements locaux, il est plus facile pour des intervieweurs d’ici d’interagir avec le répondant (en connaissant le sujet, il est plus aisé de répondre aux questions posées par la personne à l’autre bout du fil).
- Des différences culturelles (2). Au Québec, on n’est pas raciste, mais… Malheureusement, lorsque les Québécois sont appelés par des gens qui ont un accent différent du leur, il arrive souvent que leur collaboration en soit affectée. C’est un fait mesurable et mesuré : les refus sont nettement à la hausse dans ces cas précis.
- Une productivité moindre. Évidemment, 1 + 1 = 2! S’il y a davantage de refus et des problèmes techniques, la collecte prend plus de temps et la productivité diminue… les gains faits initialement sur les coûts sont alors rapidement amputés.
Dans la balance, les éléments négatifs ont finalement pesé plus lourd. Aussi, malgré une expérience très intéressante, la délocalisation n’a jamais été mise en pratique chez SOM. Comme on dit, on n’est jamais si bien servi que par soi-même…