Vaccination : les comportements reflètent les intentions
La mesure des intentions est toujours un exercice périlleux, surtout si le but est de prédire les comportements avec exactitude! En effet, entre l’intention et l’action se dressent plusieurs obstacles et événements imprévisibles qui peuvent empêcher l’intention de se concrétiser. Le consommateur ne va pas toujours au bout de son processus d’achat. L’être humain a tendance à changer d’idée.
Pour tenir compte de cette réalité, il est pratique courante de « réduire » les intentions d’achat des consommateurs en appliquant des probabilités à chaque réponse. Par exemple, 80 % des « certainement » ou 40 % des « probablement ». Ces méthodes doivent toujours être confrontées à la réalité. En matière de santé publique, ce modèle ne tient pas la route!
Retour dans le temps
En janvier 2021, un sondage SOM-Cogeco Nouvelles révélait que 56 % des Québécois avaient la ferme intention de se faire vacciner (certainement) et 23 % avaient une intention moins ferme, mais réelle (probablement). Si l’on avait appliqué un modèle intégrant des probabilités dans l’idée de réduire les intentions pour mieux prédire le comportement, on aurait prédit que moins de la moitié des Québécois auraient reçu le vaccin. Heureusement, on ne l’a pas fait!
Les faits
En date du 12 juillet, les données de l’INSPQ indiquent qu’un peu plus de 80 % des adultes québécois ont reçu minimalement une dose du vaccin protégeant contre la COVID-19. Ce chiffre correspond grosso modo à la somme des réponses « certainement » et « probablement » de notre sondage de janvier. Dans ce cas particulier, une simple addition nous mène à une prévision valable. Mais je dois l’avouer, c’est toujours plus facile d’analyser après coup!
Vers un modèle de prévision en santé publique
Parmi les raisons qui expliquent que les modèles usuels visant à corriger à la baisse les intentions afin de mieux prédire les comportements futurs ne sont pas adaptés à la vaccination, en voici cinq :
- Le bénéfice est très grand (dans certains cas, c’est même une question de vie ou de mort)
- C’est gratuit (lorsqu’il est question de produits ou services, le prix entre en ligne de compte)
- Des campagnes de communication intensives ont été mises de l’avant pour convaincre les Québécois de se faire vacciner (ce qui n’est pas toujours le cas pour des produits ou services, ou en tout cas pas à aussi grande échelle)
- La baisse des cas observée au fur et à mesure de la progression de la vaccination (phénomène qui tend à confirmer l’efficacité des vaccins et à convaincre une partie des sceptiques)
- Ça demande un effort raisonnable (quelques minutes en ligne suivi de quelques minutes dans un centre de vaccination)
Il vaut donc la peine d’aborder différemment le lien entre intentions et comportements en matière de santé publique.
En conclusion
On ne le dira jamais assez. La recherche marketing et sociale s’inscrit toujours dans un contexte. Il faut donc tenir compte de ce dernier dans la conception de chaque projet de recherche et dans l’interprétation des résultats.