Évolution historique des taux de refus aux sondages d’opinion

Évolution historique des taux de refus aux sondages d’opinion

Dans un précédent billet, j’expliquais qu’avant l’an 2000, il était possible d’obtenir des taux de réponse de 60 % et plus lors d’un omnibus téléphonique au Québec, mais que la situation s’est considérablement dégradée depuis. Cette dégradation est principalement due à l’augmentation fulgurante du nombre de refus de participer aux enquêtes téléphoniques. Le tableau plus bas montre bien cette réalité.

En 12 ans, la proportion de refus passe du simple au double au Québec alors que les taux de réponse chutent quasiment dans la même proportion. Pourtant, notre situation est privilégiée par rapport au reste du Canada et aux États-Unis! Le Council for Marketing and Opinion Research (CMOR), une association américaine, publiait en 2004 des statistiques sur les taux de réponse moyens aux États-Unis. Pour les enquêtes téléphoniques «grand public» avec composition aléatoire des numéros de téléphone, le taux de réponse moyen se situait à… 9,2%!

Évolution des taux de réponse aux sondages omnibus téléphoniques du mois de mars
(1 000 répondants par sondage – 2 à 5 sondages par mois)

Année Refus Réponse
1996 22,10% 61,60%
1997 25,50% 60,90%
1998 27,40% 60,60%
1999 28,20% 60,00%
2000 31,50% 55,80%
2001 30,70% 57,30%
2002 37,20% 52,00%
2003 35,30% 47,40%
2004 34,90% 48,00%
2005 42,90% 40,50%
2006 43,50% 38,50%
2007 42,50% 38,50%
2008 43,10% 34,30%

Un rapport fréquemment cité concernant la chute des taux de réponse est celui du sondage national sur les attitudes des consommateurs (National Survey of Consumer Attitudes) de l’Université du Michigan. Celui-ci montre une baisse moyenne annuelle de 1 % du taux de réponse depuis les 25 dernières années. Ce sondage, réputé pour sa qualité, obtenait un taux de réponse de 72 % en 1979. Malgré des efforts soutenus et très coûteux, le taux de réponse a décliné jusqu’à 48 % en 2003 – et même plus bas dans les zones urbaines (source : Richard Curtin, Stanley Presser et Eleanor Singer (2005), «Changes in Telephone Survey Nonresponse over the Past Quarter Century», Public Opinion Quarterly, vol. 69, no 1, p. 87-98).

On peut penser sans trop exagérer que nous nous trouvons en ce moment au Québec dans la situation où se trouvaient les États-Unis il y a vingt ans. Il semble inévitable que nous nous dirigions vers des taux de refus similaires dans un futur assez rapproché. La détérioration rapide et importante des taux de réponse aux sondages préoccupe un grand nombre de chercheurs, car elle pose la difficile question de la représentativité de nos études. Est-ce que l’information que nous donnons aux décideurs, au public ou à la communauté scientifique est valable? Certains songent à se tourner vers les sondages web, mais le taux de réponse diminue là également. Les sondages Web comportent par ailleurs d’autres types de limites.

Voilà un bien sombre tableau pour l’avenir de la recherche quantitative diront certains! Comme tout problème, je pense qu’il doit être considéré comme une opportunité de changement et de développement… j’y reviendrai dans un prochain billet.

Cet article a été écrit par Martin Noël, ancien employé de SOM.

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